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Le dernier jour d’une vie...

Une nouvelle de Sabri Benayad (6B)

Hier encore... Cela me paraît déjà si loin. Je me souviens de la fête, je me souviens de la joie, de l’ivresse. C’était hier. Aujourd’hui, tout est différent. Je suis devant la personne qui scellera mon destin, définitivement. Une foule m’observe. C’est angoissant. Tout est si différent... Hier encore...
C’était un samedi comme un autre. Je me suis levé à dix heures, un peu tard. Sortir du lit était assez éprouvant, surtout après une dure semaine de travail. Comptable à la SANB, ce n’est pas de tout repos. Le travail à la SANB est éprouvant du fait des nombreuses plaintes actuelles de certains clients ayant mal investi leur argent.
Enfin bon, le samedi était mon jour de repos, je comptais en profiter pour aller faire un tour en ville. Je devais aussi passer chez le coiffeur, ce serait faire d’une pierre deux coups.
Ayant envie de me retrouver un peu seul ce jourlà, car ma copine, Émilie, était devenue infernale depuis quelques jours, me demandant sans cesse de faire telle ou telle chose, d’aller à tel ou tel endroit, etc. je n’en pouvais plus. Une petite journée sans elle ne pouvait pas me faire de mal ! Je me suis préparé des œufs au plat que j’ai avalé à mon aise devant la télé. Une petite heure plus tard, il était temps de me mettre en route pour le centre ville. J’ai pris ma voiture et je suis parti. Après avoir fait un peu de shopping et être allé chez le coiffeur, j’ai décidé de me prendre un verre dans un petit café, pas loin. Après avoir commandé, j’ai ouvert un journal et j’ai commencé à lire. La serveuse m’a apporté mon café et nous avons échangé quelques mots. Elle était grande, blonde, la silhouette élancée et très souriante. Elle riait à toutes mes plaisanteries sur l’actualité, mes jeux de mots la faisaient sourire. Elle m’avait même offert un second café aux frais de la maison. Elle était sous mon charme, c’était évident. Je suis joli garçon après tout, c’est normal... Mais je ne pouvais pas succomber à ses avances, étant fidèle à ma compagne actuelle. J’ai remercié cette jolie dame et m’en suis allé, sans demander mon reste.
En rentrant à la maison, je me suis affalé sur le divan, j’ai fermé les yeux et je me suis endormi. Pas longtemps. Après cinq minutes, mon téléphone vibrait. Un appel.
C’était un ami, James. Je décrochais.
« Allô ?
— Oui, Joey ? C’est James. Dis, on fait une petite soirée avec les autres, ça te dirait de venir ?
— Bof, non, je suis fatigué et j’ai une dure journée qui m’attend demain, j’ai pas trop envie de sortir.
— Dommage, mais t’as pas le choix, je suis juste devant ta porte. Allez, ouvre moi ! »
À ce moment, on a sonné à la porte. J’ai ouvert et je suis tombé nez à nez avec James. Accompagné par quatre autres personnes. Sans dire un mot, les cinq individus m’ont saisi par les bras et m’ont littéralement enlevé de chez moi. Ils m’ont pris et m’ont lancé dans une limousine. Cinq autres personnes y étaient déjà, tous des amis.
« Tu vas voir, dis James, on va se faire une grosse soirée dont tu te souviendras longtemps !
— Bon, d’accord, si vous insistez », répondis-je.
L’ambiance était bonne, tout le monde discutait, chantait, se servait des cocktails dans le mini bar de la limousine. James était toujours à mes côtés, on parlait de tout et de rien, on riait, comme des idiots. C’était un bon ami, voilà pourquoi on s’entendait si bien. La voiture s’est arrêtée et on est sortis. Nous étions dans le centre ville, dans un quartier festif. James a emmené le groupe dans un bar. Je n’y avais jamais été, ça s’appelait Jimbows. Nous sommes entrés, c’était rempli ! J’ai vu James parler à un homme assez imposant, qui lui a montré une grande table. Elle nous était réservée. J’ai commandé une tournée de shots de vodka pour tous mes amis ; c’était ce qui annonçait le début de la folle soirée à suivre.
L’alcool coulait à flot, je me sentais perdre un peu mes esprits, mais c’était agréable ! Tout le monde parlait fort, chantait, s’amusait. J’oubliais le travail à la banque, ma copine, la fatigue. Je me sentais bien. Nous nous sommes dit que nous ferions bien de changer d’air. James nous a proposé une nouvelle boîte de nuit, le Karma. Étant de bonne humeur, j’ai tout de suite accepté. Ce n’était pas loin, alors nous avons directement été au Karma.
Le videur connaissait James, nous avons tout de suite pu entrer. La musique techno allait fort, il y avait un monde fou ! Des jeunes, dans les 18-20 ans pour la plupart. Des hommes et des femmes. Beaucoup de femmes. Elles étaient belles et dansaient de façon presque hypnotique. J’ai tout de suite été sur la piste de danse avec d’autres amis. Je dansais bêtement, j’étais bourré, je m’en fichais. Je voulais juste bouger, sauter avec mes amis, danser. J’ai repris un mojito. Puis une vodka. Puis une bière. Ou deux. Je ne sais plus. Tout devenait flou. Je ne me souviens que de la lumière des spots, du son de la musique et puis, plus rien.
Le réveil fut dur. Très dur. J’avais mal à la tête. J’ai regardé ma montre, il était dix heures. Deux personnes, qui n’étaient pas à la soirée de la veille, me regardaient. Lorsque j’ai voulu me redresser, ils m’ont saisi rudement, m’ont fait traverser ce que je reconnu être une chambre d’hôtel, jusqu’à la douche et m’ont fait couler de l’eau sur le corps. Après cette douche, l’un des deux individus m’a mis deux claques, ce qui acheva de me réveiller. Je ne comprenais pas, je ne comprenais rien. Ces deux individus ne m’étaient pas étrangers mais je ne savais plus qui ils étaient... Je me suis remis à penser à mon travail, aux plaintes... Peut-être que c’étaient des clients mécontents ? Je n’ai pas eu le temps de réfléchir plus à cette hypothèse, les deux individus, en costume à ce moment, étaient revenus. Ils m’ont fait enfiler un costume à moi aussi et m’ont prié de sortir de la pièce. C’est donc que, flanqué de mes deux « gardes du corps » j’ai été contraint de sortir de la chambre. Ils m’ont mené à un parking. Là, une voiture attendait. C’est alors que tout m’est revenu. J’ai tout compris. Cette voiture m’emmenait à la fin de la vie telle que je l’avais connue jusqu’alors.
Je devais me montrer fort. Ma vie allait changer, radicalement. Alors que je sombrais dans mes pensées, le véhicule s’arrêta dans une rue bondée. J’avais l’impression que tout le monde me regardait, je sentais leurs regards sur moi. Ça m’oppressait. Quand je suis sorti de la voiture, toujours avec les deux individus en costume, j’ai entendu des gens crier, parler très fort. Je ne voulais pas croiser leurs regards. J’en voyais certains sourire, d’autres me regarder d’un air méchant...
On se dirigeait vers un bâtiment, une grande porte était ouverte et on s’y engouffrait. On a traversé un long couloir. Mes gardes m’ont placés dans une sorte de cellule, je me suis retrouvé seul avec moi-même. Un quart d’heure, plus ou moins. L’un d’eux revint pour m’amener dans un autre couloir. On marchait, lentement. Je voyais la porte vers laquelle on se dirigeait au bout du couloir. Le stress m’envahit, je savais que derrière cette porte se trouvait un changement dans ma vie, je laissais peu à peu ma vie derrière moi, plus je marchais dans ce long couloir, plus je sentais ma vie s’éloigner de moi.
La porte s’est ouverte, je suis rentré.
La foule présente dans cette salle était énorme. Tous les regards se sont tournés vers moi. J’avais peur. J’ai traversé la grande salle dans laquelle je venais d’entrer. Je sentais les yeux des gens se poser sur moi au fur et à mesure que j’avançais. Un homme vêtu de blanc m’attendait debout sur une estrade. Je n’ai pas voulu le regarder, il m’impressionnait. Cet homme était celui qui détenait les clés de ma vie entre ses mains, je le savais. J’étais tellement obnubilé par mes pensées que je n’ai pas vu une deuxième personne vêtue de blanc entrer dans la pièce et se poster à côté de moi. Tout ça me dépassait, je ne savais plus où j’en étais. Je me souvenais de la soirée d’hier, de la joie éprouvée hier encore...
Hier encore... Cela me paraît déjà si loin. Je me souviens de la fête, je me souviens de la joie, de l’ivresse. C’était hier. Aujourd’hui, tout est différent. Je suis devant la personne qui scellera mon destin, définitivement. Une foule m’observe. C’est angoissant. Tout est si différent... Hier encore...
En face des deux personnes en blanc, j’attends ma sentence. Je sais que je vais vivre un événement important, ma vie, ma liberté s’arrêtent ici. Je lève la tête, soutiens le regard de l’homme en blanc. Il me pose une question. LA question. De ma réponse dépendra ma vie. Je sens les regards des nombreuses personnes présentes sur moi. La pression est énorme. J’arrive à murmurer une réponse. Inaudible, simple. Trois mots : « Je le veux ».
Il répond : « Je vous déclare donc mari et femme ! »

Sabri Benayad (6B) - 2014